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    1345. 1628 december 2. Van E. de Courcelles1.

    Monsieur,

    Ayant seu que vous desiries de voir en françois le livre que vous aves composé pour la défense de nostre religion2, afin qu'il profitast à tant plus de personnes, j'en ai entrepris la traduction, laquelle je vous envoye la submettant du tout à vostre jugement pour y changer et corriger ce que vous verres estre à propos; car désormais vous n'estes point apprenti en nostre langue et je ne doute point que si vous en voulies prendre la peine, vous ne vous exprimissies en meilleurs termes que plusieurs de ceux qui l'ont apprise dès le berceau. J'ai mis plus de temps à cest ouvrage que je ne pensois au commencement, mes occupations et l'estat de ma santé ne m'ayant pas permis d'aller plus viste; mais pourveu que vous soyes content de mon labeur ce sera asses tost. Je sai bien que je n'ai point esgalé l'élégance de vostre stile latin; mais j'ai eu tellement peur d'affoiblir vos argumens en m'esloignant de vos paroles, que je les ai suivi de près par tout, autant que la propriété de nostre langue la peu permettre. Je me suis trouvé plus empesché en la première periode qu'en tout le reste; je l'ai mis en deux façons, dont vous suivres celle que vous trouveres plus propre, ou mesme l'accomoderes autrement. Je me fusse donné plus de liberté en une autre traduction, mais faisant ceste-ci comme en vostre présence, je n'y ai rien voulu mettre que vous ne recognussies volontiers pour vostre. Encor qu'elle ne soit pas si polie je ne laisse pas de m'en promettre du fruit. Les raisons contenues en vostre livre sont si solides et nerveuses, qu'elles contenteront en telle sorte le jugement des lecteurs, qu'ils ne s'arresteront pas à la rudesse du stile auquel je les représente. C'est une matière entièrement nécessaire en ce temps pour estre opposée comme un rempart à l'athéisme et impiété qui se glisse par tout. Pourtant si ma traduction ne vous desplaist pas entièrement, il sera bon d'en procurer l'impression, mais sans qu'elle porte mon nom en son front, car ma profession l'empescheroit

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    d'estre si bien receuë. Au reste vous aures entendu qu'il y a un certain docte personnage en ce pais, qui fait quelques petites notes sur ce livre: il m'a donné espérance de me les faire voir dans peu de temps, mais il apprehende que vous ne les prenies en mauvaise part et contre son intention, qui n'est pas de censurer vostre bel ouvrage dont il fait un très grand estat, mais seulement de proposer ses doutes pour voir s'il en pourroit avoir quelque plus ample résolution. Quand je les aurai je les vous envoyerai Dieu aidant, et peut estre que lui mesme le fera et se donnera à cognoistre à vous s'il sait qu'il ne sera pas le mal venu, car il vous honore fort. Si je vous puis rendre service en quelque autre chose, je me sentirai grandement honoré que vous me daignies employer, et tascherai en recognoissance de plusieurs obligations que je vous ai, que je n'oublierai jamais, de vous faire paroistre plustost par effets que de paroles, que je suis,

    Monsieur,
    Vostre très humble et très affectionné serviteur
    De Courcelles.

    A Vitry le françois le 2 Decemb. 1628.

    Adres: A Monsieur Monsieur Grotius A Paris.

    In dorso schreef Grotius: Corselles 2 Dec. 1628.

    Notes



    1 - Hs. U.B. Leiden, coll. Rem. 84. Eigenh. oorspr. Betreffende geadresseerde zie no 1277, p. 331 n. 8.
    2 - Zie voor deze vertaling van Grotius' De Veritate religionis Christianae: Ter Meulen-Diermanse, no. 1060 en rem. 1 en 2.