Monsieur,
J'ay receu la vostre du 10/20 Octob.2 et vous remercie de la communication de celle à mons. le grand chancelier3 que ie luy a envoyé.
Les nouvelles du desseing du Turcq4 pour les affaires de Transilvanie nous viennent aussi par l'Hollande. Si cela continue avec quelque succès, il servira grandement aux affaires communs. Et plus encore la résolution vigoureuse que tout le monde attend de l'Angleterre après les voyes de douceur si longuement et si inutilement tentées. On est icy sur les traittez avec eux. Seulement seroit à souhaitter que les différents esmeus avecq les Hollandois sur le fait de la pesche peussent estre conduicts à quelque accommodement raisonable.
Hier on a chanté le Te Deum à cause de la reddition de Corbie. Chose vrayement inopinée et qui monstre la grande vigilance et dextérité du cardinal5 qui s'est faict rendre une ville d'où sont sortis douze cents et vingt soldats se portants bien et cela en un temps mal propre aux sièges et n'estant encore attaqué que le dehors.
L'autre ioye de la France est que Gallas6 n'ayant pas peu prendre St. Jean de Loane secouru par Ranzou7 se retire vers le Franche-Comté. Et la troisiesme cette grande victoire des Suédois près de Witstock, de laquelle nous apprenons
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touts les iours des particularitez plus advantageuses pour nous et en attendons des plus grands succès.Le prins d'Orange8 a mis par la nécessité du temps ses gens en garnison, mais si proche de la frontière que si l'occasion de quelque entreprise se présente, ils ne seront pas loing à cercher.
Le roy9 par un nouveau traité et promesse d'un million et demy pour l'armée qui vient, a engagé mess. les Estats de Provinces Unies de ne traitter point sans luy, cette somme d'argent succédant au lieu de l'invasion que le roy par le traitté précédent avoit promis de faire dans le Pays-Bas que les temps présents ne semblent pas bien permettre.
Le landgrave d'Hessen10 ne laisse pas d'agir et de pâtir. Je croy que la glace empeschera mons. le grand chancelier de passer de Suède en Poméranie pour cette année que la conduicte de tant d'armées diverses auroient bien besoin d'un tel directeur. Mais aussi en Suède ils ne laisse pas d'amasser des gens et des moyens pour amener les affaires d'Allemagne à une iuste paix.
Je demeure, monsieur,
Vostre serviteur très humble.
Le 13 de Novemb. 1636, à Paris.