Monsieur,
Nous avons d'Italie que le duc de Parme s'en va mettre en action pour recouvrer son estat de Castro jugeant trop incommode à soy de se consumer inutilement dans son pays, s'estant pourtant desja advancé avec son armée sur le Bolonois, et doit estre fort de X mille et 3 mille chevaux.2 Les Venetiens n'en son[t] pas trop contens, mais s'estans engagés avec la protection de son pays, il faut qu'ils continuent le bal commencé et doivent avec le duc de Florence et celuy de Modene empecher que les papalins ne puissent passer dans l'estat de Parme pendant qu'iceluy duc sera occupé à recouvrer Castro. C'est un commencement d'une longue guerre que le pape eust peu prevenir, si ne se fust laissé emporter par l'ambition de ses nepveux, et aura assez à faire de resister à une si puissante ligue qu'on brasse contre luy.
D'ailleurs le prince Thomas a desfait auprès de Vercel 13 compagnies de cavallerie du comte de Biglia, dont 200 sont demeurez prisonniers avec tout le bagage et argent dudict comte, qui à peine s'en est sauvé en chemise. On escrit nea[n]tmoins de Milan qu'après ceste action le marquis de Carazene avec 36 compagnies de cavallerie ait poursuivi les gens du prince et les [a] battu auprès de Bielle.3
L'ambassadeur d'Espagne s'est retiré de Rome à Aquila4 et le vice-roy de Naples forme un corps d'armée de X mille hommes dans l'Abruzze pour se revancher de l'affront fait à Rome à l'ambassadeur de son maistre par la nonchalance des Barbarins, qui l'eussent bien peu empecher, s'ils vouloyent. On dit aussy que le roy d'Espagne veut abolir l'authorité du pape par tous ses estats et faire un patriarche, et si les autres princes feront le mesme, ce sera le vray moyen pour reunir les eglises chrestiennes en une bonne paix, que l'ambition [du] pape empeche jusques à cest' heur.
Au reste je suis bien en peine que vous ne me procurez jusques à cest' heur ces deux cent dalers de monsieur Heuf5 et ne sçay quoy entreprendre en ceste intolerable cherté, aucun
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argent ne me venant point de Hamburg contre ce que monsieur le marechal m'a promis. Je vous supplie pourtant encor une fois per omnia sacra et humana de m'en faire assister au plustost pour l'honneur de la couronne et combler par ce moyen vos merites envers moy, qui n'en seray jamais ingrat, comme celuy qui n'ay plus grande passion que d'estre utilement, monsieur,vostre serviteur redevable,
C. Marin m.p.
De Zurig, ce 15/25 de Septembre l'an 1642.
Bovenaan de brief schreef Grotius: Rec. 8 Oct.
En in dorso: 15/25 Sept. Marin.
En nogmaals: 25 Sept. 1642 Marin.