Monsieur,
Je vous remercie de la confiance que prenez à l'affection que vostre bonté a merité de moy, depuis que j'ay eu l'honneur de le cognoistre, de laquelle j'ay tousiours porté avec moy le ressentiment très vif en tous lieux où Dieu m'a fait pourmener. Entre plusieurs obligations que je vous ay, celle-là n'est pas la moindre que par vostre faveur. Je retiens tousiours quelque part dans la souvenance de ce brave prince2 qui par son exemple monstre que les courages heroiques sont au dessus de tous les efforts de la fortune.
J'ay esté bien aise de donner par cette occasion les arrès du service que je dois à une vertu si éminente et à un si noble sang: espérant que le temps m'en fera naistre de meilleures. Je vous remercie et de la continuation de vostre bienveillance et des nouvelles que me mandez; en récompense de quoy je vous voudrois aussi en pouvoir mander des quartiers de la mer Baltique ou ceux qui devoyent nous estre amis nous ont réduit. Mais le vent qui longtemps a empesché tous les voyages par mer vers la France nous cache la particularité des prospéritez qui selon l'apparence et les bruits qui courent ne peuvent estre que très grandes depuis la victoire du mareschal Banier3 à Kiritz.
Cependant le caresme prenant n'est pas passé icy sans grande resiouissance à cause du secours de Colmar. Le duc de Parme4 vient icy passer son caresme et donner des preuves indubitables de sa fidélité envers la France.
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Je laisseray les autres nouvelles pour celuy qu'avez envoyé icy qui est bien cogneu et veceu à la cour et me contenteray de vous dire une chose vieille, c'est à dire, monsieur, que j'ay esté, suis et seray tousiours
Vostre trés humble serviteur.
A Paris, le 30 Jan./8 febr. 1636.