Monseigneur,
Si ie ne croyois pas, que vous sçachiez tout ce qui s'est passé aux nopces de Sa Majesté de Poulogne2, i'entreprendrois d'en faire un petit récit y ayant esté tousiours présent et veu toutes les solennitez qui s'y sont faites. Mais ie n'en veux pas estre molest à vostre Excellence, ie ne dire que de la seule comédie, qu'on y a ioué de la S.te Cécile3, une pièce très rare, parfaitement bien faite et tellement représentée, qu'on dit qu'il n'y a eu de semblable en 50 ans dans toute l'Europe, hormis celle-là qu'on ioua à Florence aux nopces du duc d'Urbin4 il y a si longtemps.
Depuis on a tasché de nous faire voir une autre comédie et présenter comme on pouvoit avec bonne grâce prendre des nouveaux imposts à nostre rade y ayant mis quatre navires pour ce subiect. Un des acteurs est monsieur Spiring5, mais qu'il s'en acquiert fort peu de réputation et d'affection auprès des Estats de ceste province et quasi de tout le royaume.
Il semble que quelques envieux de nostre repos et de la douce paix dont nous avons d'autant iouy nous vueillent troubler et par ceste nouvelle gabelle attirre la haine des estrangers, qui viennent trafiquer avec nos marchands. Mais pourtant i'espère qu'on y donnera bientost ordre et que Spiring sera envoyé ailleurs practiquer ses belles inventions. Son frère, monsieur Peter Spiring6, s'est bien offencé de cest attentat de son frère et en est très malcontent.
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On ne sçait encore s'il y aura une diète ou non ceste année veu que Sa Majesté n'y incline pas fort.
Le ieune prince Radzivil7, grand chanbellan de Lithvanie a esté fiancé il n'y a pas longtemps avec la fille du feu palatin Braicslawsky8 de la famillie Botocky ayant eu à ce qu'on dit 18 corrivaux.
Le Chinan bassa9 ayant repassé le Danube nous a délivrez de l'appréhension des armes ottomannes. Ceux de l'armée des confins qu'on appele Quarçany n'ont esté payez dans septs quarts d'an - car ainsi ils content leurs monstres d'un quart d'an à l'autre - dont ils se sont grandement plaints à Sa Majesté par leurs députez, demandant avec grande instance leurs monstres. Mais puisque les imposts que les Estats on accordé à la diète précédente, ne pourront pas de moitié suffire à leur payement, on craint une mutinerie et un ravage du pays.
Ie prie Dieu de tout mon coeur qu'il nous face d'oresnavant paisiblement et sans troubles iouyr de ceste douce paix, qu'il nous a donné et conserve longtemps vostre Excellence avec toute sa noble famillie en parfaite santé et toute sorte de prospérité.
A Danzig, le 5. de Novembre l'an 1637.
Monseigneur,
de vostre Excellence le très humble serviteur
Jasky mpp.
Adres: A Monseigneur Monseigneur de Groot, Ambassadeur ordinaire de la Couronne de Suède à la Cour du Roy Très-chrestien A Paris.
Boven aan de brief schreef Grotius: 5 Nov. Jasky 1637.
In dorso: Rec. 24 dec.