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Monsieur,
Tout est icy en joye à cause de la victoire2 obtenue par le comte de Guebrian avec vos Hessiens. On luy envoye d'icy de l'argent, et croit-on qu'il sera fait marrescal de France. D'autre part on s'offence du mauvais traittement que les Anglois font à leur roy et leur reine et s'en pourroit-on bien resentir. Quoyqu'ayant assez d'affaires, le roy de France est allé à Fontainebleau, sera le 25 à Lions; la reine le suivera en Avril. Les discours sont divers sur le voyage et sa Majesté augmente l'incertitude, ayant donné ordre à quelques-uns de l'attendre à Carcassonne et d'autres à Avignon. Il y a qui veulent qu'on assiege Dolen pour chastier les Comtois, qui depuis peu ont bruslé quelques villages des François, autres croyent qu'on va à Perpignan, le vice-roy de Breszé ayant receu des bonnes trouppes du Languedoc. Plusieurs croyent qu'on a desseins sur Nizze, et semble que le vice-roy de Naples le croit, lequel sur les remonstrances du cardinal de Savoye y a envoyé six mille ducats, deux navires avec amunition de guerre, six avecq du bled, comme il a aussi envoyé 800 hommes pour renforcer la garnison de Final, lequel lieu est menacé du costé de Monaco. Le roy a fait un grand magasin de toutes choses necessaires à la guerre à Pignerol, dont il y en a qui esperent qu'on attacquera Milan, les peuples de ces quartiers estant [si] mal satisfaits que quelques des soldats espagnols ont esté tuez dans Cremone et n'a-[t]-on sceu appaiser la sedition qu'en ostant la garnison. Le pape devient aussi suspect aux Espagnols.
Messieurs Erlach et Ossenville sont entrez dans Hohentwiel, y ont trouvé 400 soldats. Le gouverneur de la place a acquis grand honneur aux despens de Sparre et à sa retraitte deux mortiers, 4 canons, deux charriots d'amunition. Les François travaillent à applanir les forts commencez à bastir par les imperialistes. Le duc Charles est à Worms. Le roy et le duc de Baviere ont fait pour l'eschange du marescal Horn et le baron de Waert tout ce que nous desirons, et Snolky, secretaire dudit marescal, a obtenu en Allemagne ce qui restoit à achever [de] cet affaire, de quoy nous esperons bientost l'issue. Le roy n'est pas bien content de ce que monsieur d'Avaux a pris le jour si court pour la conference, à laquelle on jettera icy des accroches, pour ce qu'on a conceu des grandes esperances pour cette année, le roy n'en estant jamais parti plus alaigre.
Je suis et seray [à] jamais, monsieur,
vostre tres humble serviteur.
Le premier de Fevrier 1642.
On dit que le secours qu'a receu le marescal de Breszé est de 1500 à pied, 700 chevaux. La garnison de La Bassée fait des courses au pays entre ce lieu et l'Isle et il y a pris le chasteau de Merigniez. Le dote de madamoiselle de Bourbon est de 260 mille escus.
Bovenaan de copie staat: Vicquefort.