Monsieur,
Ce petit mot ne servira que pour vous donner advis de mon retour de Benfelden, où j'ay trouvé monsieur le mareschal Horn2 en si parfaite santé, qu'il me semble plus jeune et gagliard qu'il n'estoit pas lorsque j'ay eu l'honneur de le voir au siege de Costance.3 Il s'en va en peu de jours par la Lorraine à Paris et je l'eusse accompagné tres volontiers jusques en Suede, mais parce qu'il ne me le veut permettre et promet qu'à son arrivée à Hamburg il me fera avoir mon change, je suis contraint de luy obeir et attendre pour un peu de temps, si l'argent qu'on me promet viendra bientost. Il veut aussy travailler à Paris avec monsieur Heuf,4 afin qu'il paracheve ce qu'il me doit, en quoy je vous supplie de le seconder et faire tant que pour le moins il m'envoye trois ou 400 dalers pour m'en servir dans ma necessité incroyable tant icy qu'en Voltoline, où faute d'argent je ne puis pourvoir aux affaires de ma femme.5
Les Grisons continuent en leur mesfiance envers le pape et prient messieurs de Venise de ne luy donner point de passage contr'eux. Mais pour moy je crois que le pape aura bien d'autres affaires sur le bras. On a permis icy le passage aux trouppes que monsieur de La Valette leve, et le mesme feront les Grisons, dont cinq sont capitaines, qui doivent servir à la Republique.6 L'armée du pape est encor dans l'estat de Ferrare, attendant l'issue de la negociation des ministres de France avec le duc de Parme,7 qui a introduit dans son estat 6 mille hommes naguerres levés. L'accord des princes de Savoye avec Madame n'est pas encor achevé
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et à mon advis ne se fera pas sitost.8 Quelques-uns veulent que le fils du Gran Seigneur est mort9 et qu'il ne va plus à Adrianople10 comme les princes de Transylvanie et Moldavie11 craignoyent.Continue[z]-moy, s'il vous plait, l'honneur de vos bonnes graces et me croyés tousjours, monsieur,
vostre serviteur tres obligé,
C. Marin m.p.
De Zurig, ce 31 de Mars l'an 1642.
Je vous supplie de baiser les mains de ma part à monsieur le baron Skyt,12 s'il est à Paris, et me mander s'il va en Suede. Car je luy voudrois escrire.
Je vous supplie de me mander chasque ordinaire le receu de mes lettres pour en estre asseuré.
Bovenaan de brief schreef Grotius: Rec. 22 April.
En in dorso: 31 de Mars 1642 Marin.