Monsieur,
J'ay des lettres du jeune baron d'Ochsenstirn2 qui a passé la mer pour traitter de la paix, par lesquelles il me recerche de la correspondance que j'aye à tenir avec luy; aussy ne manqueray-je pas de le faire, y estant obligé par le lien de ma charge et par commendement exprès de nostre reine. Mais je suis marry que je n'ay point encor des nouvelles du payement de mon gage qu'on va tousjours différer de jour à autre à mon gran regret, et d'ailleurs je ne puis tirer aucune assistance de personne. Patience.
Si vous sçavez que messieurs Bielky3 passeront par icy, je vous prie de m'en donner advis,
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car le jeune Banier4 les attend à Rome, où l'affaire de Parme est encor bien embarassé et semble plustost se disposer à la guerre qu'à un accom[m]odement, le pape voulant qu'au préallable il5 désarme et vient à Rome en personne pour despendre entièrement de sa grâce en la restitution de ce qu'on a pris sur luy, com[m]e le verrez par cy-joint advis6 qui me viennent de bonne main.Les impériaux auprès de Hohetvil ont fait une terrible cacade, car ayans perdu quantité de gens et des munitions, ils sont contrains de s'en retirer ès quartiers d'hyver dans le voisinage. Ils veulent néantmoins faire des forts à l'entour de la place et les garnir des gens pour par ce moyen continuer le blocus durant cest hyver, et cependant recerchent les Suisses de n'assister point en façon que ce soit ceux de Hohetvil des vivres et des munitions de guerre, mais prendre plustost la place en séquestre pour en desnicher le commendant d'icelle7 qui véritablement a acquis de la gloire grande durant ce siège.
Quelques cantons ont desjà consenti la levée de France, mais la plus gran part sont encor en doubte de ce qu'ils doivent résouldre sur ce suject, à cause de l'Austriche qui fait tout ce qu'elle peut par des lettres pour empêcher ladite levée.
Les Grisons ne sont pas encor d'accord pour le restablissement des cappucins dans l'Engadine, aussy n'ont en receu aucune pension depuis leur dernier traitté avec Espagne,8 et sur 120 m. escus qu'on doit à leur milice dans le Milanois ils n'ont touché que 12 m. escus, la voulant pourtant rappeller, s'ils ne sont satisfaits ce mois-cy.
On tient Aire9 pour rendu et Erfort en danger d'estre pris par trahison qu'on y doit avoir descouvert.
Je me reccom[m]ande à vos bonnes grâces et vous en demande la continuation com[m]e celuy qui suis passionnément, monsieur,
vostre serviteur redevable
C. Marin mp.
De Zurig, ce 16 de Xbre l'an 1641.
Je voudrois sçavoir, si Mon.r Sadler10 est en compagnie du baron d'Ochsenstirns.
Bovenaan de brief schreef Grotius: Rec. 8 Ian.
En in dorso: 16 Dec. 1641 Marin.