Monsieur,
Je m'estonne de ce que [vous] me dites par vostre derniere2 que les finances de France sont tellement espuisées par le feu cardinal et les siens qu'il n'y a rien de reste là, où on croit icy que la France a de quoy faire la guerre mesme pour l'an qui vient et que ledit cardinal ait laissé au roy du sien environ douze millions d'or.3 On escrit que la France a donné aux Hollandois le secours d'argent deu,4 et quand nostre argent sera desboursé, je vous supplie de m'en donner advis et disposer monsieur Heuf5 au parachevement de
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ce qu'il me doit, puisque les deux mille dalers qu'on m'a envoyé d'Hollande6 mes creanciers ont emporté, et tant que je ne leur paye le reste, ils font difficulté de m'accommoder plus du prest de leur argent. C'est une pitié qu'on me detient si longtemps mes arriere-gages, qui à tous les autres sont payés.Les liguez7 sont desja tous dans le Ferrarois, où ils s'entrebattent tousjours avec les gens du pape, qui par son opiniastreté scandalize tout le monde et pourra s'attirer quelque ruine sur l'hierarchie romaine. Les Espagnols après la reprise de Tortone se reposent dans le Milanois8 et le prince Thomas se trouve au Piedmont, attendant le secours qu'on luy envoye de France.9 Les Vinarois marchent vers Hohetvil10 avec 15 mille hommes pour combattre les Bavarois.
Je demeure, monsieur,
vostre serviteur,
C. Marin m.p.
De Zurig, ce 15 de Juin 1643.
Bovenaan de brief schreef Grotius: Rec. 10 Iulii.
En in dorso: Marin 15 Iunii 1643.