Monsieur,
J'appren[ds] fort volontiers par vos dernieres du 12 de ce mois, que les Hollandois se veulent mesler par force de nos differends2 et crois que par ce moyen ils obligeront bientost le roy de Denemarc à une raisonable paix. Celle d'Italie est non seulement signée à Venise au gran[d] contentement de tous,3 mais despuis on en a eu les ratifications necessaires du gran[d]-duc et duc de Modene, et après du pape mesme, tout s'acheminant à present à une entiere execution d'icelle dans les deux mois de temps qui ont esté prefix pour cest effect. La France en a aquis beaucoup d'honneur,4 surtout luy donnet-on des benedictions à Venise pour cela non pareilles, et si elle sera autant heureuse au maniement de celle avec Denemarc5 elle s'en pourra dire bien glorieuse. Le pape continue à estre fort malade et si foible que dernierement en donnant la benediction au peuple il n'a peu lever son bras, moins souffrir la couronne sur sa teste, de sorte que la prophecie qu'on a de sa mort qu'elle arriveroit dans ce mois-cy pourroit reussir veritable.6
Cependant on bat Uberlinghen à toute furie,7 et deux tours en ont esté desja ruinées sans qu'il y ait aucune nouvelle du secours que les François disent vouloir donner aux assiegés. La diete de Coire est finie, mais nous ne sçavons pas encore comment, si ce
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n'est que les deputés suisses ont pris tout ad referendum,8 et se trouvans desja au retour nous en apprendront bientost des nouvelles. Un agent de l'empereur9 a apporté des lettres à ce canton-cy, par lesquelles il les exhorte à l'observance de la paix hereditaire et qu'on ne donne des vivres aux François qui sont dans Uberlinghen, s'y defendens fort bravement.Je continue à estre miserable et fort perplex en ce que je dois faire, et quand je ne vous escriray plus par deux ou trois ordinaires, ce sera signe que je suis en chemin pour m'en aller vers vous10 ou bien malade, dont Dieu me garde et vous conserve en tres parfaite santé, que vous souhaitte, monsieur,
vostre serviteur tres humble,
C. Marin m.p.
Messieurs de Zurig n'ont receu aucune satisfaction de ce qui s'est passé vers Stein,11 tous les cavaliers françois de Hohetvil ayans esté menés en Alsace pour y servir dans l'armée.12 Les François en Italie13 se renforceront des trouppes de sa nation qui servent au pape et à la ligue pour faire tant mieux la guerre dans le Milanois, s'ils pourront.
Les Bavarois se preparent à donner l'assaut à la ville d'Uberlinghen, où on dit que les soldats françois deviennent fort malades.
Bovenaan de brief schreef Grotius: Rec. 12 Mai.
En in dorso: Avril ... Marin 1644.