Monsieur,
Les dernières que i'ay eu de vous ont esté du 28 et du 30 de juin vieu style2 toutes deux du mesme contenu. Ayant receu premières celles du 30 i'y fis incontinent response, par laquelle outre les affaires qui se passent icy ie vous manday qu'il y avoit quelque temps que ie vous envoyay les lettres du roy3 pour vostre affaire lesquelles ie disois espérer, comme i'espère encore, estre parvenues à vos mains. C'estoit monsieur de Metrezat4 qui avoit voulu prendre la peine de les
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vous faire venir. Depuis nous n'avons pas eu grand chose de quoy vous resiouyr, sinon de vos quartiers, les affaires au Pays Bas n'estant pas réussis à souhait. Les deux belles armées ayant esté forcées par faute [de] vivres de quitter tant les places acquites que les espérances et faire la retraite vers Rurmonde, à quoy est survenu autre malheur que le fort de Schenkenschans a esté surprins par les ennemis5, à quoy monsieur le prince d'Orange6 cognoissant l'importance de la place incontinent est accouru pour le reprendre, à quoy il faudra employer le reste de celle armée sans pouvoir songer à d'autre chose.Nous ne sçavons pas bien ce qu'entreprend monsieur le grand chancelier7 qui est en asteure dans l'armée du mareschal Banier8. Il aura bien de la peine pour rasseurer les courages esbranlez par tant de mauvaises nouvelles et par le mauvais exemple de l'électeur de Saxen9. Toutefois cognoissant le grand courage et prudence de monsieur le grand chancelier nous devons espérer que Dieu bénira les travaux. A quoy ne servira peu la belle armée que le roy envoye soubs le cardinal de la Valette10 vers le Rhin, laquelle accompagnée par la cavallerie du duc Bernhard11 a fait quitter à Gallas12 le siège de Deuxponts et la ville de Keiserslauteren, laquelle il avoit acheté au prix de tant de sang de part et d'autre. Le duc de Lorraine se tenant prez de Remiremont et le mareschal de La Force13 à Espinal empeschent l'un l'autre de faire aucun progrès.
Si tost que nous aurons quelque chose de plus particulier, principalement de monseigneur le grand chancelier, nous ne manquerons de le vous faire sçavoir, et cependant ie prieray Dieu, monsieur, de vous conserver en santé et prospérité.
Vostre serviteur très humble.
Le 19 Aougst 1635 n.s.