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Monsieur,
Je me resiouy grandement d'apprendre par la vostre du 25/15 d'aoust2 que le petit service que ie vous ay rendu icy ne vous est pas désaggréable, vous souhaittant que vous en puissiez tirer le fruict désiré, et vous asseurant que ie désirerois vous pouvoir rendre des services plus efficacieux. Je ne manqueray pas d'envoyer au grand chancelier3 la lettre de Constantinople4, comme ie luy ay envoyé les précédentes que m'avez envoyé, comme ie n'ay pas obmis aussy de faire mention telles que ie dois de vous et de vos services en celles que i'ay escrittes à mon dict seigneur le chancelier.
Les advis que vous me donnez de l'incursion des Tartares en Poulogne et des Cosaqques à la Mer Noire nous sont confirmées aussi de Hambourg. Ce qui pourra faciliter le traitté entre la Suède et Poulogne5, de quoy nous n'avons rien de certain, mais seulement de bruits.
Cependant vous aurez apprins comment que monsieur le landgrave6, prince digne du nom alleman, assisté des troupes suédoises a traversé une bonne partie de l'Allemagne et est venu iusqu'au Mein, là où le cardinal de la Valette7 et le duc Bernhard8 luy sont allé devant, faisant ensemble, comme on nous escrit, trente et cinq mille hommes, trop forts, comme nous croyons, pour estre attaquez de Galas9, lequel craignant reperdre ce que là estoit acquis a esté forcé de repasser le Rhin: d'où nous attendons d'heure et heure de bonnes nouvelles: comme aussi du costé de Lorraine vers lequel le roy10 en personne s'achemine, avec vingt braves régiments recuillis de divers quartiers, en intention de forcer le duc Charles11 à quitter le pays, ou à venir à une bataille. Cependant monsieur le grand chancelier ayant esté visité par une ambassade de l'électeur de Saxen12, luy a renvoyé une de la part de Suède13, pour luy remonstrer le mal que peut apporter une paix particulière et pleine d'équivoques à la Suède, à la France, à toute l'Allemagne, et à l'électeur mesme, monstrant par toutes ses actions et conseils, qu'il préfère le général à la satisfaction qu'on luy offre pour la couronne de Suède et aux honneurs et commoditez pour luy.
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Nous attendrons de vous, monsieur, la continuation des actions glorieuses du duc de Rohan14 qui seul a plus faict cette année icy que tous les autres ensemble.
Dieu le bénisse, monsieur, et vous conserve en santé et prospérité.
Vostre très humble serviteur.
A Paris, le 8/18 Sept. 1635.