60
Monsieur,
Vous ayant naguieres faict response2 par addresse de Monsr. Reigerberg à la lettre consolatoire3 qu'il vous pleut m'escrire de vostre triste prison, j'avois autant de regret et déplaisir qu'elle vous allast trouver en lieu si deplaisant à vous et à tous vos amys, comme j'ay de parfaict contentement d'apprendre que Dieu vous en ait ouvert une issuë, telle que sa bonté vous a voulu témoigner de quelle efficace a esté l'esperance que vous avez euë en luy, qui sans rompre ny portes ny serrures vous a sceu tirer d'où la rigueur vous avoit confiné. De quoy je luy ay rendu aussy affectionnées graces qu'amy que vous ayez au monde, et ensuitte n'ay manqué d'en donner adviz en nostre cour, où, pour coupper le chemin aux instances de vostre liberté, on avoit, comme vous aurez sçeu, tres artificiellement publié la fin de vostre vie. Je prie celuy qui vous en a donné maintenant une plus aggréable jouissance, de vous la conserver longtemps pour servir a sa gloire et au public. Cependant sur l'oppinion conceuë par moy que vous auréz pris la brisée de France j'ay faict à l'avance tous les offices que vous auriéz peu désirer à l'endroit de sa Majesté et de Messieurs ses principaux Ministres en vostre faveur, lesquelz j'espère ne nieront point à ce qui est deu à vos mérites; et de plus j'ay prie Monsieur Marbault4, mon beaufrère, de vous visiter, et vous offrir son assistance et ma bourse qu'il a en garde, de laquelle je vous prye d'user aussy librement comme de la vostre mesme, car à cela je cognoistray que vous m'aymez. J'espéreray au reste que le Sr. Franchemont5 me rapportera de vos nouvelles et que vous croirez tousjours comme je vous en conjure très affectionnément que je suis de très bon coeur,
Monsieur, Vostre bien humble et plus fidelle amy et serviteur
Dumaurier.
De la Hayë ce 28e Mars. 1621.
Adres: A Monsieur Monsieur Grotius.