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Monsieur,
J'ay mandé à v.e Ex. le 5 du présent,2 comme j'avoy receu deux de ses lettres, lesquelles j'aurois envoyé par un courrier exprès à M.r le mareschal Horn,3 et que cependant M.r du Hallier,4 devançant mesmes mon espérance, avoit desjà demandé de M.r d'Erlach5 un convoy pour conduire Jean de Wert6 de Saverne à Brisach, et qu'iceluy ayant passé chez nous, nous espérions de voir ledit De Wert le lendemain. Mais que sçachant comme M.r d'Erlach n'avoit point d'ordre pour mettre en effect l'eschange des deux prisoniers, je suppliois v.e Ex. trèshumblement de sonder à la cour, si ledit ordre pouvoit d'advanture avoir esté donné à quelqu'autre des officirs du roy en ce pays, auquel d'eux, et en quelle forme ou manière, afin d'en pouvoir tant mieux sol[l]iciter l'exécution, au cas que le duc de Bavière n'y apporte point de difficulté, comme à son rang. Maintenant il faut que je donne advis à v.e Ex. que ledit convoy a hier esté de retour, mais sans Jean de Wert et sans sçavoir aussy la vraye raison, pourquoy il n'a pas esté rendu à Saverne au jour nommé. Seulement dit-on que ç'a esté changé de peur des trouppes du duc de Lorraine et que l'on auroit trouvé plus seur de le faire conduire par le chemin de St. Diey et de S.te Marie-aux-Mines vers Schletstatt, dont j'attends à cest heure l'issue. D'autre part mon courrier n'est pas encor de retour d'Ingolstat, tellement que je ne sçay pas, si M.r le mareschal a eu permission de voir mon paquet, et encor moins la résolution du duc de Bavière touchant son eschange. Mais cependant estant très-nécessaire que l'on sçache, à qui c'est que le roy a donné ses ordres à l'exécution d'iceluy et en quelle manière, je supplie encor qu'il plaise à v.e Ex.ce de s'en informer le mieux qu'elle pourra et de m'en instruire au plustost.
Depuis ma dernière v.e Ex. aura sceu d'autres les bonnes nouvelles de l'avantage que nos armées ont eu près de Wolfenbuttel sur la cavallerie ennemie, en ayants desfait plus de 1200 tellement que sans la mort du comte de Nassau et du colonel Muller7 la victoire auroit esté assez grande; mais cependant nous ne laissons d'estre en peine pour le corps Suédois, car tant plus que le nouveau chef en tarde de venir,8 tant plus de difficulté trouvera-il à le restablir dans sa primière et ancienne forme.
Au reste je suis et seray éternellement, monsieur,
de v.e Ex.ce le très-humble et très-obéissant serviteur
Mockhel mp.
De Benfeld, ce 13 de Sept. 1641.