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Monsieur,
J'appren[ds] par vos tres aggreables lettres du 8 courrant2 le passage de monsieur le general Horn de Calais pour l'Hollande et voudrois qu'il fut desja à Hamburg ou en Suede,3 pour voir l'effect de ses esperances qu'il m'a faites touchant mon particulier, estant icy en un tres pitoyable estat parmy une cherté si excessive et l'importunité de mes creanciers, ausquels il seroit desormais temps que je donnasse meilleure satisfaction que je n'ay point fait jusques à ceste heur. Monsieur Heuf4 fait mal qu'il ne me paye le reste de ce qu'il me doit, et je m'estonne que vous ne m'en mande[z] rien de ce que je dois attendre de luy.
Monsieur l'ambassadeur de France a passé par icy pour aller faire sa devotion à la Sainte Marie.5 Don Schavedra est aussy de retour de Bade,6 où n'ayant peu monstrer ses lettres de creance aux Suisses en general touchant la neutralité de la Contée, on n'en a rien peu resoudre pour ceste fois, mais on dit qu'il se faira bientost une autre diete, où il doive comparoistre avec tel pouvoir que personne n'y sçaura contredire.
Nous apprehendons en nostre voisinage quelque alarme à cause de la venue de Jean de Vert,7 qu'on dit se trouver desja auprès de Rotvil avec 6 à 7 mille hommes, mais nous ne sçavons pas encor bonnement, si c'est pour attaquer les villes forestieres ou gaster le blé de la campagne.
Les princes de Savoye attendent la ratification de leur traitté avec Madame,8 laquelle arrivant on croit qu'ils attaqueront à vive force ou le Milanois ou les places que les Espagnols tiennent dans le Piedmont, puisqu'ils ne les veulent rendre qu'en suitte d'une paix generale ou de celle d'Italie.
A Rome l'ambassadeur d'Espagne est armé, ayant esté renforcé par le vice-roy de Naples de quelque 150 soldats fort resolus, mais à l'entrée de la ville quelques-uns en ont esté saisis et mis en prison, dont les Espagnols sont encor d'autant plus enragés contre le pape.9 On escrit de Vienne que l'empereur mettra bientost en campagne 80 [?] mille hommes, y compris les paysans et le ban des gentilshommes de l'Austriche, Styrie, Carynthe et Ungrie. Si monsieur Torsenson peut cependant battre Piccolomini, il aura de bons quartiers d'hyver dans l'Austriche.
Je me reccommande à vos bonnes graces et vous supplie de me croire à jamais, monsieur,
vostre serviteur redevable,
C. Marin m.p.
De Zurig, ce 14/24 de Juillet l'an 1642.
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Je voudrois sçavoir si monsieur le baron Spar10 est à Paris ou s'il est party avec monsieur le marechal Horn, aussy bien que le baron Skyt.11
Bovenaan de brief schreef Grotius: Rec. 14 August. 1642.
En in dorso: 24 Iulii 1642 Marin.