Monsieur,
J'espère que vous aurez receu mes lettres par lesquelles i'ay respondu aux vostres de temps en temps: et principalement celle-là avec laquelle ie vous envoyay la lettre du roy2 touchant vostre affaire.
Depuis nous avons eu icy par les lettres du duc de Rohan3 et d'autres les advis de la victoire obtenue entre Tirano et Bormio, qui nous donne espérance de voir relever les courages des Grisons et des Suisses, afin de se tenir prests sur toutes occasions qui se pourront présenter dans l'Italie, le traitté entre le roy et le duc de Savoye4 estant signé. On espère qu'au Pays Bas les affaires iront mieux depuis que les armées ont prins des routtes diverses pour mieux trouver des vivres, celle des Hollandois estant allé pour prendre Rurmond et d'autres places proches de la Meuse, et celle des François pour battre l'ennemy. Entre nous et le général Gallas5, Jean de Werth6 et le duc de Lorraine7 avoient donné de la terreur par la prinse des villes foibles. Mais le roy ayant donné de l'argent au gens du duc
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Bernhard8 et outre l'armée qu'il tient en Lorraine faisant marcher vers le Rhin le cardinal de la Valette9 avec une bien grande, ne doubte point qu'en peu de temps on ne face repasser l'ennemy vers les quartiers d'où il est venu.Monsieur le grand chancelier10 est asteure dans l'armée du marescal Banier11 prez de Magdenburg et travaille pour retenir les princes confédérez de suivre le mauvais exemple donné par l'électeur de Saxe12 en quoy il est grandement appuyé de l'autorité du roy, qui ne manque pas aussi de donner des bons advis et faire toute sorte des bons offices par son ambassadeur13, pour mettre la Suède et Poulogne en quelque paix pour le moins temporelle, afin que la couronne de Suède estant libre de ce costé-là puisse agir tant plus puissamment avec la France pour le salut de la pauvre Allemagne.
Dieu nous est favorable en plusieurs choses, mais principalement en ce qu'il nous conserve le roy icy en santé parfaicte: laquelle la mesme bonté éternelle luy conserve, et vous tienne aussi, monsieur, dans sa protection paternelle.
Vostre serviteur très humble.
A Paris, le 31 juillet 1635 n. st.