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Monsieur,
J'ay donné l'addresse à la vostre du troisiesme de ce mois n. st. à monsieur le grand chancelier2 qui continue à se tenir en Suède iusques à ce qu'on voye plus clair ce que sera de la paix ou de la guerre.
Quant à la paix le roy de France3 les passeports pour les ambassadeurs d'Espagne4, mais le roy d'Espagne5 n'en a pas faict de mesme pour ceux de la France6 se poinctillant sur le changement qu'on a faict d'avoir mis le cardinal de Lion7 au lieu du marescal de Bressé8. Le cardinal Ginetti9 qui est seul à Cologne a faict faire des instances par le nonce10 qui est à Bruxelles vers la royne-mère11 pour contribuer tout ce qu'elle pourra à la paix.
Monsieur de Feuquières12 est appellé icy pour se transporter à Cologne. Mais à Ratisbone il semble qu'on ne se haste pas non plus qu'à Madrid.
Cependant Gallas13 avec toutes ses forces a faict reculer celles de France deçà la Saône.
Je n'ay pas de lettres fresches d'Allemagne, mais les advis de tous costez mettent le marescal Banier14 dans la Thuringue et nous donnent Erford.
Je suis bien aise de l'ordre qu'on met au payement des troupes Grisonnes et le sera d'advantage quand ie verray l'affaire de la Valteline réduit à quelques termez modérez. Nous verrons aussi si l'entremise du pape et du grand duc15 pourront sauver le pauvre duc de Parme16, la France en ce temps ayant tant d'affaires chez elle en trois endroicts, estant envahie par les ennemis et outre cela les mescontentements ne manquans pas au dedans que difficilement pourra elle s'employer pour les amis au dehors.
On travaille tousiours pour contenter monsieur le frère du roy17 et le comte de Soissons18 ou pour le moins le contenir dans le repos. Et pour le printemps les Hollandois se remueront et le progrez de nos armées en Allemagne apportera du soulagement à la France.
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Je demeure, monsieur,
vostre serviteur très humble.
Ce 23 Décemb. 1636.