Monsieur,
J'appren fort mal volontiers que les affaires d'Escosse vont tousiours de mal en pire; les protestans suisses escrivent dereschef tant au roy de la Gran Bretagne qu'aux Escossois2 les exhortans à un aimable accomodement pour lequel nous prion Dieu qu'il le veille faciliter.
Binghen est pris avec le chasteau par Gheleen3, qui menace à ceste heure Creuzenach, ceux de Mayance ayans surpris Bacharach. L'empereur luy envoye 6 régimens bien forts, qui jusques à présent seront à Spire et si les trouppes auprès du lac de Costance se joignent à luy, ils pourront avoir quelque 12 mille combattans. On escrit, que don de Melos4, qui revient de Sicile et est attendu à Milan, doit commander ceste armée du Rhin, qu'on lève aux despens du roy d'Espagne pour le recouvrement de l'Alsace, mais pour ceste année il ne fera guerre, les François ayans pris Arras et l'Espagne ayant à faire chez soy sans pouvoir appaiser les Catalonois, qui dereschef ont tué la garnison de Tortose et celle de Barcellone et sont soustenus par le peuple d'Arragon et de Valence; et ces maux intérieurs sont le vray moyen de rabbattre l'orgueil d'Espagne ou la contraindre à une raisonable paix, que don Melos doit avoir plein pouvoir de conclurre ou accorder trevfes tant particulières que générales.
L'empereur recerche une conférance avec les 8 cantons vieulx, qui sont maistres de la Turgovie5, sur le suject de Costance et d'autres points, qui touchent l'armée du Rhin, mais on n'est pas d'accord du lieu que l'empereur recommande (?); Feldkirch et les cantons de Zurig et Bern voudroyent Costance et devant le milieu du mois de septembre à gran peine se pourront-ils assembler.
I'y joint ce que i'ay de Rome6 et attend de vous advis de ce que monsieur Strasbourg7 porte pour moy et si Jean de Vert8 sera bientost ammené à Benfeld en eschange de nostre mareschal Horn, dont monsieur Mukel9 me presse fort de luy en dire quelque chose avec certitude aussy bien que de la prolongation de l'alliance entre nous et la France.
Ma femme10 se porte mieux, mais non point la bourse qui n'a point de remède que la
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patience, durum pro me telum11. Je vous supplie de me dire à quelle condition est remis monsieur le prince électeur12 en sa liberté les opinions en estans icy diverses.Je demeure, monsieur,
tout le vostre
C.M.m.s.
De Zurig, ce 27 d'Aoust 1640.
On a jetté dans Turin dix barils de poudre et quelque cavaliers espagnols ont pris monsieur l'intendant de finances Argenton et le gouverneur de Turin13 qui sont desià à Milan.
L'affaire de Suiz avec l'abbé d'Einsidel14 ne se peut accomoder aimablement et ie crain que le pauvre prestre ne reçoive bientost un affront de ceux de Suiz qui sont gens fort effarouchés.
Boven aan de brief schreef Grotius: Rec. Rec. 20 Sep.
En in dorso: 27 Augusti 1640. Marin.