Monsieur,
Vos espérances qu'il vous plait me continuer par la vostre du 16 courrant2
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sont bien bonnes, mais ie souhaitterois qu'elles fussent desià raccourcies par l'effect mesme ces descomtes tardans trop à venir.Les Grisons ont emporté de l'ambassadeur de France3 des bonnes espérances pour l'envoy d'un secours dont ils ont besoin á quoy ceux de Zurig et Berne contribueront leur possible y estans fort intéressés. Mais nous craignons que les trefves d'Italie ne poussent l'Espagnol à prévenir ce coup en opprimant ceux de la faction de France avec ses forces. Dieu y pourvoira.
Ceux de Hohetvil par leur dernière sortie ont desfait plus de 50 impériaux partie tués partie pris, et ayans ietté des grenades dans leur batteries les ont démolies et forcé le reste de s'en retirer plus en bas d'où on ne leur peut nuire ny avec la mine ni par des grenades. Le comandant4 nous en a donné advis et asseuré l'arrivée du Rhin qu'il est hors de danger et en estat de pouvoir tenir longtemps. L'on tient néantmoins bloqué la place et le reste de l'armée de 8m hommes descend vers Friburg pour attaquer quelque place où come les autres croyent pour résister aux nostres qui sont dans le Palatinat où ils ont pris Cron-Veisenburg et donnent gran alarme au voisinage.
L'ambassadeur de Venise5 a esté à l'audience du vézyr6 et de là ramené libre dans son palais, ayant emporté bonne espérance de pouvoir accomoder le différend de sa république moyennant trois cent mille zequins7, que le gran seigneur8 veut employer contre la Poulogne s'il n'attaque Sicile ou Malte.
Je vous communique cy-joint pièce9 des princes de Savoye10 qu'il vous plairra envoyer en Suède, car i'en fay mention.
Monsieur vostre fils11 sur le point de son départ m'a fait l'honneur de me voir en ma maison, estant pourtant marry de ne luy avoir peu tesmoigner par quelque signe évidant l'estime que ie fais de luy et de vostre surtout personne que ie chéris et honore intrinséquement. Ce sera pour un autres fois à la rencontre d'une meilleure occasion mais tousiours en qualité, monsieur, de
Vostre serviteur très humble et autant affectionné
C. Marini.
L'accomodement des Vénétiens avec le Turc pourra aussy servir aux Grisons, qui solliciteront leur assistance.
De Zurig, ce 22 d'Aoust s.v. 1639.
In dorso schreef Grotius: 22 Aug. 1639 Marini.