Monsieur mon père,
J'avois prié ma mère la semaine passée de vous importuner touchant le diférent que j'ay avec monsieur de Naeltwijck2, depuis elle est partie pour ses affaires en Zéelande et m'as laissée isy. Monsieur de Naeltwijck sachant son apsence avec celuy de mes oncles3, m'as envoyé notaire pour me faire rendre copie du testament qu'il avoyt aprys que son frère4 m'avoit laissée; à quoy j'ay répondu comme j'avoys desia fait à luy mesme que ie croiois que l'on devoit cest honneur au défunt de donner la sepulture à son corps, avant que ce mestre en peine de sa sucsession. Ce qui ayent esté prins de luy pour un refus, a présentée requeste pour avoir prinse de corps contre moy et l'auroit optenu sans l'advertissement de mon-
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sieur Crommom5. Ainsy pour éviter l'affront qu'il me vouloit ferre en me faisant garder en ma mayson, on m'a fait passer une procuration et chosir domicile chés un procureur, qui répondras pour moy quant il en ceras le besoing.Me voyent donc en affaires et en estast d'avoir procès, avant mesme que j'avoir résoulu luy rien demander, j'ay creu ne pouvoir avoir millieur recours qu'à mon père, qui outre que je ne puis m'adresser à persoone qui me soit plus proche et affectiannée, me pourras ausy mieux que tout autres informer de droit que j'ay a prétendre quelque chose à ce testament, duquel ma mère a envoyé une copie la semaine passée, et prier que si en cas qu'il soit trouvé suffissant vous me vuillez ordonner de quelle fason icy proséderay. Les incivilitez dont ils ont usée en mon endroit et dans lesquelles ils persistent encor, ne m'oblyge pas à leur rien laisser de courtoisie. Le bruyt qu'il fait courir de dire des choses qui me pouront estre préjudiciables, me feras à son opinion désister, et à moy qui ne crains rien, avec justice me feroyent plustost résoudre à céder ce que j'ey, puis prétendre au pouvres quant bien ie serois résoulue à n'en rien tirer pour mon particulier, mais remets le tout à ceque vous en jugerés à propos.
On me dit que cest arêt contre ma persoone a estée pour prévenir que je ne fisse juger du testament en Frence, et que ayent là un arrêts pour moy je pourrois le faire exécuter isy, il m'anvoyeras encor ajourner et me donneras temps pour instituer mes prétension ou désister entièrement.
Je voudrois bien savoir ausy si en cas que je voulusse me déclarer évitière, ma cause le permettant si il peut me contraindre à le fair en ce lieu et si il a droit me fairre demeure[r] isy, n'estent pas leur sujette.
Quant à la volont[é] de monsieur de Berkel je suis asseuré quelle a estée de me laisser ses biens et m'as priés instamment de n'en point laisser joyr son baeufrère, et s'est offert plusiers fois à me le faire passer par notaire si ie jugois que ce papier n'estoit point sufisant.
Mais j'ay maintenant à vous demander pardon de vous avoir entretenu d'un discours si importun et ne pouvant rien dire de bon finiray celle isy demeurant, monsieur mon père,
Vostre trèshumble et obéy[s]sante fille
Cornelia de Groot.
De La Haye ce 8 d'Aust.
Boven aan de brief schreef Grotius: Rec. 16 Aug. 1639.