Monsieur,
Pour toutes nouvelles nous avons icy la conclusion de l'alliance des Grisons avec Espagne, jurée solennellement à Milan le 24 passé s.v. le iour de S. Bartelemy qui sans doubte causera une guerre intestine dans les Grisons bien sanglante, la faction contraire se roidissant à n'y vouloir point consentir et attend seulement le
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secours qu'on doit résouldre à Bade. Ils en ont emporté oultre d'autres dons 36 chaines d'or en signe de leur servitude, et avec assistance d'Espagne veulent domter ce peu de bonnes gens qui sont parmy eux, ce qui à la vérité coustera bien de sang et le pis est que nos protestans icy sont fort lents pour les assister, voyans que la France n'embrasse leur intérest avec telle vigueur qu'il faudroit.Les dits députez2 sont de retour à Chiavenne y attendans les officiers pour prendre la possession de la Voltoline conforme les conditions piéça accordées, sans avoir peu obtenir pour le moins l'habitation libre des protestans Valtolins. Ie croy qu'il y aura de la difficulté en l'exécution, car les habitans ayans juré par cydevant l'observance du traitté de Monçon3 n'en voudront reculer au desceu de la France, ny se soubmettre à une partie seule des Grisons. Avec le temps ie vous communiqueray tous ces traittez, qui certes sont préjudiciables à tous, et annéantissent l'alliance de France et des Suisses protestans dont ne demeure que le seul nom, s'obligeans par iceux à une entière dépendance d'Espagne tant au fait des passages par leur pays que des alliances avec d'autres princes, et promettent la levée de 6m hommes à l'Espagnol au plus et 3m mille pour le moins toutes et quantes fois qu'ils ne seront point en guerre et en danger d'icelle: et à l'encontre ils auront l'assistance en tout temps et en gens et en argent de Milan contre quel qu'il soit.
L'armée impériale s'approche de nous en intention de passer le Rhin auprès de Koblenz et Klinau pour faire la descente sur le territoire des Suisses ce qui nous donra bien de l'alarme. Ceux de Hohetvil avec leur[s] sorties continuelles endommagent grandement les impériaux dont ils en ont despêché desià plus de mille et sont hors de danger et en estat d'estre bientost secourus. Le commissaire impérial4 qui avec son avocatoire cy-ionct qu'il vous plairra envoyer en Suède est à Basle n'ose plus sortir à cause du peuple qui luy menace la mort.
Je demeure, monsieur,
Vostre serviteur de tout mon coeur
Marini.
De Zurig, ce 12 de 7bre 1639.
I'atten quelque argent de Hamburg.
In margine schreef Grotius: Plusieurs des députez à Milan ont juré en élevant leur main de ne permettre que ceux de la religion habitent en Valtoline où les officiers s'acheminent.
In dorso schreef Grotius: 12 Sept. 1639 Marini.