Monsieur ...,
J'ay fait responce à la vostre du 12/22 de Xbre2; celle-cy est pour vous asseurer de la réception de vostre dernière3 avec celle du jeune Camerarius4 qui m'advise de son retour en Hollande.
Messieurs les protestans en Suisse sont fort en alarme à cause de ceux de Strasburg, quibus ex rigore faederis antiqui succurrere deberent, et exhortent les autres cantons cattoliques d'intercéder pour leur relaxation ceux de Basle, de Zurig et Schaphausen en pâtissant grandement à cause de leur commerce qui par ce moyen est empêché, mais tout dépendant immédiatement de la disposition de l'empereur5 on craint que leur lettres n'opéreront guerres si ceux de Strasburg n'acceptent point la paix de Prague6.
Nous attendons de iour et autre quand la garnison de Hohetvil sortira pour faire place à celle de l'empereur qui en fera un autre Fuentes contre les protestans
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en Suisse si avec l'aide du roy7 ils n'y remédient point. Mais ie voy la mesme fatalité en Suisse qu'en Allemagne et ay gran peur que ces pays ne subissent (?) bientost le ioug de la maison d'Austriche qui ayant tant à prétendre sur la Suisse la plus gran part néantmoins d'icelle suit son party et advance le bien d'iceluy metu belli à son possible et ce qu'il y a eu de bon est tout sans force et courage qui surtout aux protestans manque.On attend bientost le retour des Grisons d'Espagne8 d'où on dit qu'ils ayent esté despêchés bien contents et accompagnés hors de Madril avec trente carosses et chargés de tant de chaines d'or, ce qui seroit signe que l'empereur voudra poursuivre la guerre en Italie à toute oultrance puisqu'il chérit tant les Grisons qui autrement a cause de leur légèreté (?) sont hays de tout le monde.
Nous ne sçavons pas encor bonnement quand on s'assemblera à cause des forts de Rhin et de Steig, ceux de Berne ne voulant consentir à aucune conférance avec les Grisons sans estre au préallable esclaircys sur quoy ils doivent conférer avec eux.
On dit que le chasteau de Volgast est pris et Banier9 assiégé sans pouvoir secourir Vrangel10.
Je vois nos affaires sur un point de précipice et n'y a que Dieu qui y puisse remédier, en la sauvegarde duquel ie vous reccomande et demeure à jamais, monsieur,
Tout le vostre
Mariny.
De Zurig, ce 4/14 du Jenvier l'an 1638 auquel ie vous souhaitte toute sorte de prospérité.
Adres (met andere hand): M.r Grotius.
Boven aan de brief schreef Grotius: Rec. 28 Jan. 1638.
In dorso: 4/14 Ian. 1638 Marin.