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Monsieur,
L'honneur que vous m'avez faict autrefois de vos bonnes grâces et l'extrème désir que j'auray à jamais de me rendre digne d'un si grand bonheur en vous asseurant avec une sincère dévotion de mon très humble service, furent l'occasion de la hardiesse que j'avois de vous addresser ce présent porteur avec commission de vous baiser les mains de ma part et me faire sçavoir, si entre vos plus hautes pensées y demeuroit encore la moindre souvenance de vostre serviteur.
Il m'a donné advis avec combien d'humanité, courtoisie et faveur, il vous a pleu le reçevoir et luy faire mention de moy. Ce qui m'est une obligation si grande, que je ne puis pas satisfaire à moy mesme et beaucoup moindre me justifier au monde, si je ne la confesse avec toutes sortes de ressentiments et professions du respect et affection sincère.
En tesmoignage de quoy je n'attends rien avec plus de dévotion que l'occasion de vous rendre service et s'il y à quelque chose par deça en quoy je vous puisse estre considérable, permettez moy l'honneur de vos commandements et je ne manqueray point de vous obéir.
Cependant, monsieur, j'ay pris encore la hardiesse de vous faire un petit présent pour une gage de ma fidélité. C'est un petit livret2, lequel - si vous n'avez pas veu desjà - ne vous sera point - peut-estre - désagréable.
Je m'asseurez que vous cognoissiez mieux que moy le progrès de l'affaire qu'a donné subject à ces discours en ayant esté traicté depuis un an ou deux en une région ou rien de conséquence ne peut passer, sans vostre cognoissance. Mais puis que l'humeur chagrin de quelques-uns non pas si addonnez à la paix come tous les bons les eussent souhaité, a empesché - au moins pour quelque temps - l'heureux succès de l'affaire en ce quartier-là, tellement que celuy qui y estoit engagé en est desjà sur le chemin pour se retirer, je ne sçay chose au monde, qui me rendra plus content que d'en avoir le jugement d'un home si sçavant et si experimenté come vous, monsieur, de ce qu'il a entrepris et de moyens pour le faire parvenir à un tel fin, que puisse réussir à la gloire de Dieu et la paix et soulagement de son Eglise. Ce que je désire avec plus de zèle, pource qu'ayant esté faict participant des toutes ses procédures jusques à icy, j'ay remarqué en luy une si admirable prudence, humilité et patience invincible, joyncte avec une doctrine non pas ordinaire que je ne suis pas sans espoir d'un heureux événement, si l'affaire n'est pas en soy mesme impossible3.
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Monsieur vous voyez que je n'ay pas oublié la franchise que vostre bonté m'a permise au temps passez, quand j'avois l'honneur de me jouir de vos bonnes grâces. Pardonnez moy, je vous en supplie, et commandez avec la mesme franchise,
Monsieur,
Vostre trèshumble et trèsobéissant serviteur
Jo: St. Amand.
A Londres 19o Junij 1638, stylo veteri
Adres: A Monsieur Monsieur Grotius, Ambassadeur de Swede, à Paris.
In dorso schreef Grotius: 19 Iunij St. Amand de Londres.