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Monsieur,
I'ay receu vostre lettre du 29 du passé2 aussy bienque les précédantes, mais ie ne compren pas bien ce mot d'acquit ce que ce vous entendez par iceluy. Car de vous envoyer ou au sieur Heuf3 récépissé de ce que ie n'ay point receu, ce seroit un paradoxe et contre le style des marchands qui desboursent peu (?) préallable l'argent et puis on leur en envoye le récépissé comme i'ay fait de ces deux cent risdalers qu'on m'a payez icy. Vous ne sçauriez croire en quelles difficultés et angoisses d'esprit ie me trouve enveloppé à cause du delay de ce payement, car oultre quod creditores fidem meam in dubie vocent, l'intérest croît journellement de plus de douze cent dalers que ie dois et en paye ... huict par cent ne puis aussy me pourvoir des choses nécessaires pour mon mesnage à temps, de ces deux cent dalers ayant payé le louage de la maison et autres deutes moindres. I'ay mon escrivain4 estropié d'apoplexie auquel devant une bonne somme il faut que ie le nourisse avec d'autres de ma famille. Ma femme5 est aussy tousiours malade seulement de mélancolie qu'elle voit qu'on n'abbandonne tant et qu'à cause des deutes elle ne peut s'en aller en Voltoline pour pourvoir à ses affaires. Ie vous supplie pourtant, monsieur, per omnia sacra de disposer le sieur Heuf au prompt envoy de mon argent ou au moins d'une partie l'asseurant que aussy tost ie luy en envoyeray le récépissé et pour plus d'asseurance ie vous prie d'y vouloir intéresser vostre authorité et faire un accord raisonable avec luy conforme que trouverez bon et lequel ie tiendray inviolablement pourveu qu'il ne soit de dommage. Ie luy voudrois escrire moy mesme, mais puis qu'il est vostre amy ie laisse faire à vous et seray fort aise que ce change aye sa perfection. Mon gage me demeure en arrière pour 28 mois, d'où vous pourrez juger, en quel estat ie me trouve avec sept personnes.
Pour le public vous sçaurez l'arrest du Göz6 que les Espagnols ont des ...- ché et establi en sa place le comte de Mansfeld7 qui toutes fois pour à cest'heur n'est pas à l'armée en estant party pour trouver l'empereur8 et luy faire rapport de ce qu'il a veu, ayant laissé le comandement au Lamboy9 qui attend le Piccolomini10 et se retire vers le pays de Virtemberg pour y passer l'hyver, aussy bien que le duc de Lorraine11 en Bourgogne. La milice est bien combattue de famine et froid ne pensant moins que de vouloir secourir Brisac qu'on tient desià pour perdu et les ostages envoyés d'une part et d'autre traittans d'accord nous font attendre journellement la reddition de la place qui causera des gran conséquences partout en Allemagne.
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Monsieur le duc12 voudroit avoir le chancelier Valdemar13 à cause de son langage outrageux contre sa personne et c'est luy qui traine un peu la conclusion du traitté projetté.
Ie ne vous manderay rien de la trahison qu'on a descouverte en Savoye puis que vous en sçaurez desià les particularitez.
Les Vénetiens ont destiné un ambassadeur extrordinaire en France14 pour solliciter la délivrance du prince Casimir15 continuant cependant leur préparatifs contre le Turc16 qui bransle encor avec sa résolution.
Les députez Grisons17 ne sont pas encor de retour d'Espagne qu'il faut attendre pour voir clair dans leur affaire. Ils appréhendent fort la prise de Brisac et 2m Espagnols sont attendus aux confins de la Voltoline pour y entrer en cas qu'on se voulust prendre aux Grisons. I'y ioinct ce peu que i'ay de Rome en attendant d'autres particularitez.
Nos Bernois fournissent bravement des vivres au duc de Veymar lequel ie voudrois aussy aller trouver après la prise de Brisac si mon argent arriveroit bientost. Cependant ie vous prie de me reccomander à vostre fils18 qui est auprès de S.A. en cas que i'eusse besoin de son addresse.
Ie demeure, monsieur,
Tout le vostre
Marin.
En haste de Zürig, ce 6/16 de Xbre 1638.
Le duc de Modène19 a accepté le généralat sur la mer océane et on croit que par eschange il aura le royaume de Sardigne. La duchesse de Mantoue20 pren aussy à coeur la mort de son castellan21 à Casal et panche plus du costé de l'empereur qui y mande son agent pour y résider.
P.S. Ie suis de vostre advis que si l'Angleterre ne se resould bientost et puissamment pour les Palatins en faira la paix aux despens des petis, les intérests de la Suède et France se pouvant tousiours bien accomoder en abbandonant ceux du Palatin22 et recognoissant le roy d'Ungrie23 pour empereur. Haec in Dei manu sita sunt24. Son résidant25 est à Basle et promet des gran choses, mais estant Espagnol de faction ie n'en crois rien jusques à ce que ie voye les effets.
In dorso schreef Grotius: 16 Dec. 1638 Marin.